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Faux indépendants – nouvelle situation légale à partir du 1er janvier 2007

12.07.2007

La loi-programme du I du 27 décembre 2006 comprend un titre consacré à la problématique des faux indépendants. En effet, les lacunes de la législation belge quant aux critères de distinction entre le statut d'indépendant et d'employé ont entraîné un contentieux très important. Les risques liés à une requalification d’une relation de travail étaient très importants.

1. Principe

La loi confirme que les parties disposent du libre choix de leurs relations de travail. Les parties choisissent librement la nature de leur relation de travail.  Ce choix est tout de même limité par un cadre légal. En effet, il faut que la qualification choisie soit compatible avec l’ordre public et les lois impératives. En outre, il faut que l’exécution effective soit en concordance avec la nature de la relation. La priorité est à donner à la qualification qui se révèle de l’exercice effectif si celle-ci exclut la qualification choisie par les parties.

En présence de présomptions légales impliquant l’application d’un certain statut, la nouvelle loi ne s’applique pas.

Afin d’obtenir une plus grande sécurité juridique, la nouvelle loi :

- définit 4 critères généraux;

- permet au Gouvernement de définir des critères complémentaires et propres à un secteur ou à une catégorie de profession ; 

- organise un ruling social afin d’obtenir dès le départ une sécurité juridique;

- donne des incitants à la régularisation (avec un allègement des charges financières liées à un changement de statut).

Il est évident que la loi ne peut pas régler toutes les situations de manière générale. Dès à présent, il est certain que les juridictions devront se prononcer sur des cas litigieux.

2. Les critères généraux

La loi-programme reprend quatre critères généraux pour qualifier une relation de travail. A ce sujet, le législateur s’est inspiré de la jurisprudence actuelle. Afin de déterminer s’il y a un lien de subordination ou non, il faut examiner les critères généraux suivants :

- la volonté des parties telle qu’exprimée dans leur convention, pour autant que cette dernière ne contrevienne par à l’ordre public, aux bonnes mœurs, aux lois impératives et qu’elle soit conforme à la réalité;

- la liberté d’organisation du temps de travail;

- la liberté d’organisation du travail;

- la possibilité d’exercer un contrôle hiérarchique.

En cas de litige, un juge doit apprécier la situation. A ce niveau, il faut signaler que les juridictions doivent porter un jugement sur la situation globale. Aucun critère ne prime sur les autres.

3. Critères neutres

D’après la loi, certains éléments ne peuvent être pris en considération  pour déterminer la nature d’une relation de travail:

- les contraintes légales inhérentes à l’exercice d’une profession;

- l’intitulé de la convention;

- l’inscription auprès d’un organisme de sécurité sociale (ONSS, INASTI,…), de la Banque-carrefour des entreprises ou de l’administration de la TVA;

- la manière dont les revenus sont déclarés à l’administration fiscale.

4. Les critères spécifiques

Lorsqu’il n’est pas possible de déterminer une relation de travail sur base des critères généraux, une liste de critères spécifiques propres à un secteur, à une ou plusieurs professions peut être établie par arrêté royal.

La loi-programme prévoit que cette liste de critères spécifiques peut comporter notamment des éléments suivants :

- la responsabilité et le pouvoir de décision sur les moyens financiers afin de maintenir la rentabilité de l’entreprise;

- la garantie de paiement périodique d'une rémunération;

- l’investissement personnel et substantiel dans l’entreprise avec du capital propre et la participation personnelle et substantielle dans les gains et pertes de l'entreprise;

- la possibilité d’engager du personnel ou de se faire remplacer;

- se présenter comme une entreprise à l'égard du cocontractant et des tiers;

- travailler dans ses propres locaux et/ou avec du matériel propre.

Ces critères spécifiques ne peuvent toutefois déroger aux 4 critères généraux.

Pour l’instant, ces critères spécifiques n’existent pas encore. La mise en vigueur de ces dispositions dépend de la mise en place de procédures et d’institutions. Au plus tard pour le 1er janvier 2008, les dispositions relatives aux critères spécifiques seront mises en vigueur.

5. Le ruling social

La loi met également en place une section administrative au sein de la Commission de règlement de la relation de travail, chargée de rendre des décisions au cas par cas.

La décision de la section administrative lie l’ONSS, l’INASTI et les Caisses de sécurité sociale pour autant que les données transmises par les parties soient complètes et exactes et restent inchangées. Les décisions de cette institution sont susceptibles d’un recours devant le Tribunal du travail.

Le ruling social ne peut pas encore être sollicité pour l’instant. La mise en vigueur de cette partie de la loi est prévue au plus tard pour le 1er janvier 2008.

6. Les incitants à la régularisation

Puisque les conséquences d’une régularisation peuvent être très lourdes, le législateur a prévu, en faveur des parties procédant à une régularisation de manière volontaire, un allègement de ces conséquences.

En résumé, la rectification des cotisations de sécurité sociale ne portera que sur les cotisations dues depuis l’entrée en vigueur, le cas échéant, de l’arrêté royal établissant des critères spécifiques, à l’exclusion des majorations, intérêts et autres frais ou sanctions. Pour le surplus, les cotisations dues à l’INASTI peuvent être déduites des cotisations résultant de la régularisation. Il va de soi les cotisations effectivement payées à l’INASTI ou à la caisse d’assurances sociales avant la requalification ne pourront pas être récupérées par le travailleur. Les sanctions pénales liées à la mauvaise qualification ne sont pas d’application.

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